Jan Kopp

Sur fond maritime, un bâtiment en con­struc­tion est le décor de diverses apparitions et dis­pari­tions : des formes abstraites rappelant des sacs plastiques flottant dans le vent, des draps tendus à chaque étage, un enfant dansant au son d’une musique folklorique. Quand une ville apparaît en plan élargi, trois hommes se disputent autour d’un journal laissé sur la route. Présence sourde des problèmes politiques, il évoque ce que les infor­ma­tions inscrivent jour après jour, dans le quotidien d’un pays. La dernière partie du film d’animation revient au paysage initial de la maison inachevée et de la plage. Les petites intrusions de draps flottants, de bagarres ou de danses d’enfants qui semblent reprendre, à leur compte, la dispute des hommes de la ville, sont éloignées de la dureté de la structure géométrique en béton. Elles intro­duisent un regard poétique et délicat, où l’absence et la disparition semblent se jouer de ce que la présence d’une telle con­struc­tion signifie dans l’économie de l’île. Car, à Chypre comme ailleurs, construire, c’est prendre possession du territoire. Seul le paysage demeure inchangé dans l’étrangeté de cette temporalité recon­stru­ite. Face à ce bâtiment imposant, qui fait bloc, l’achèvement de toute action humaine planifiée et cohérente semble ici mis à mal. La présence humaine apparaît fragile, elle se défait et ne peut s’approprier aucune matière, aucune identité, ni unité.