Françoise Parfait
Botanica Entropica, 2010Botanica Entropica se présente sous une forme ambiguë. Rétroprojetée, l’image d’une maison s’inscrit dans la planéité de la cimaise, en plein jour. Le plan est fixe, le grain de l’image extrêmement net, sans mouvement, vibration ou pixel apparents. Seule la bande sonore, qui laisse entendre des petits craquements non identifiés, évoque une micro évolution de quelque chose. De manière presque imperceptible, les fleurs sur le balcon et l’herbe sur le sol se développent ou au contraire fanent, selon le moment où l’on appréhende l’œuvre. Cette maison, située sur la clôture qui ceinture les arrières quartiers résidentiels de Varosha (Chypre) occupés par l’armée turque, en appelle tout d’abord aux souvenirs de l’enfance, de maison familiale, cossue, de vacances. Mais, petit à petit, une sorte d’anachronisme, de disproportion et d’incongruité s’impose dans les fleurs fières, dressées et à la densité “ déplacée ” pour un balconnet de fenêtre. Derrière l’apparence paisible d’une nature domestiquée, se cache, à peine dissimulée, la trace de l’abandon sous les traits de l’informe et du désordre. Françoise Parfait s’est rendue à trois reprises et à différentes saisons devant cette maison. Elle a observé les effets du temps qui dessèche les trop grandes plantes, laissant des ombres squelettiques sur la façade, puis, lors d’une visite suivante, les couleurs d’un nouveau printemps. La vidéo de Françoise Parfait propose une fascinante cohabitation entre la fixité artificielle et intemporelle du bâtiment, du ciel, de la route et la croissance discrète de la végétation soumise aux variations saisonnières. Hors du temps des hommes et livrée à elle-même, la maison déploie sa propre vitalité, autonome, entropique et sidérante.
- Date 2010
- Technique Suite d’images photographiques numérisées, 2 min.
- Copyright © Françoise Parfait. Collection de la Province de Hainaut. Photo : Leslie Artmonow