Priscilla Beccari

Cette suite de huit lith­o­gra­phies, réalisée à l'atelier Bruno Robbe et présentée dans un boîtier façonné par la relieuse Véronique Van Mol, condense les motifs majeurs de l'univers de Beccari. On y retrouve la femme ligotée, seins censurés, aux gants en caoutchouc –incarnation ménagère, fan­tas­ma­tique et critique à la fois– développé dans Petit homme sur grande échelle, l'hybridation grotesque de la Pin-up, les objets détournés, les corps fragmentés. Chaque image ouvre un espace narratif suspendu, une fable absurde entre rêve, souvenir et constat social.

Ces lith­o­gra­phies fonc­tion­nent comme une syntaxe visuelle, un langage d'archétypes recomposés. Beccari s'y livre à un travail d'assemblage, de glissement poétique et symbolique, entre passé collectif et vécu personnel. Les figures, souvent féminines, sont captives, étranges, entre bêtes, objets et personnages de conte. Le titre de la suite condense à lui seul toute l'ambivalence de l'univers de l’artiste: entre tendresse apparente et contrôle implicite, il évoque la tension entre soin, emprise et désir de liberté, centrale dans sa lecture des rôles féminins. Par cette suite sérielle, l'artiste déploie un récit discontinu, qui fait vaciller les rôles, les désirs et les violences dans un théâtre graphique intime et politique.