Sylvie Pichrist, "Ophélie", sans date. Collection de la Province de Hainaut

Sylvie Pichrist, "Ophélie", sans date. Collection de la Province de Hainaut

Sylvie Pichrist, "Ophélie", sans date. Collection de la Province de Hainaut

Sylvie Pichrist

Ophélie, sans date

Sylvie Pichrist a cousu une robe en soie noire entièrement recouverte d'éponges naturelles. Elle l'enfile, puis se glisse dans l'eau d'un point forestier connu sous le nom de "l'étang des enfants noyés", au cœur de la forêt de Soignes. Son corps immergé devient un élément du paysage, fusionnant avec le feuillage environnant dont les tons sombres et chauds répondent à ceux des éponges. Une pho­togra­phie, empreinte d'onirisme et de mélancolie, est alors prise par Jonathan Steelandt, figeant cet instant suspendu où le corps, le vêtement et la nature ne font plus qu'un.

Par cette action, l'artiste construit un rituel fragile et intro­spec­tif où le corps féminin devient réceptacle et résonance du lieu. La scène fait écho à la célèbre peinture Ophélie du peintre préraphaélite John Everett Millais (1851-52), où le personnage de Shakespeare, chantant avant de se suicider, dérive lentement dans une rivière anglaise. Chez Pichrist, comme chez Millais, ce n'est pas le moment de la mort qui est représenté, mais l'instant précédant la disparition, entre apaisement et abandon, entre soulagement et tension.

Cette performance se prolonge ensuite dans une action intitulée Ophélie, le retour. L'artiste invite cette fois les passants à pho­togra­phi­er Ophélie à l'aide d'un Polaroid. Par un procédé chimique, elle imprime ensuite ces images sur des galets qu'elle extrait de l'eau au cours d'une nouvelle performance filmée. L'ensemble forme un rituel con­tem­po­rain où la mémoire se matérialise, se fragmente, s'efface, dans une tension entre apparition et disparition.

Ces œuvres s'inscrivent dans une logique de cérémonie poétique et symbolique, chère à l'artiste, où la nature devient le théâtre d'une méta­mor­phose du corps et du souvenir. La robe –vêtement organique– devient une seconde peau transitoire, tandis que la pho­togra­phie enregistre une mue silencieuse, à la lisière du conte et du mythe.

  • Date sans date
  • Technique Robe en soie noire cousue d'éponges naturelles et photo impression encollée sur aluminium
  • Copyright © Sylvie Pichrist – Collection de la Province de Hainaut
Installation

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